Le Sommeil du nourrisson de 0 à 3 ans
L’essentiel
La compréhension du sommeil du nourrisson représente un atout pour mieux vivre les nuits classiquement perturbées des premiers mois et peut aider à accueillir avec bienveillance les éveils nocturnes du jeune enfant.
Dans le ventre de sa mère, le fœtus se développe avec des cycles de veille et de sommeil qu’il gardera quelque temps après sa naissance. Ces cycles vont fortement évoluer au cours des premiers mois avec la maturation de l’horloge biologique située dans le cerveau. Connaître l’organisation du sommeil en fonction de l’âge permet de suivre cette évolution.
Ce dossier traitera également de l’environnement et des facteurs favorables au plaisir du sommeil, à l’importance du sentiment de sécurité du nourrisson ou encore à la manière de coucher son bébé.
Respecter les rythmes et besoins du jeune enfant contribuera à son développement harmonieux tant au niveau physique que psychique et programmera son cerveau pour les nuits à venir.
Maturation et organisation du sommeil
L’organisation du sommeil d’un bébé s’installe progressivement et la patience est de mise pour surmonter les difficultés jusqu’à la mise en place du rythme jour/nuit de 24 heures.
C’est vers l’âge de 3 ans que le sommeil du jeune enfant se rapproche de celui de l’adulte. Mais pour en arriver à ce stade, le cerveau doit prendre le temps de maturer. Le rythme repos/activité de la maman au cours de la grossesse et l’alternance lumière/obscurité après la naissance, sont des « donneurs de temps » importants pour synchroniser l’horloge biologique sur les rythmes circadiens.
1/ Le sommeil du nouveau-né à terme
Entre la naissance et un mois, le nouveau-né dort entre 16h et 18h sur 24h, même si certains auront besoin de 14h de sommeil et d’autres, de 20h.
Le nouveau-né s’endort en sommeil agité (l’équivalent du sommeil paradoxal de l’adulte) et alterne des phases de sommeil agité et de sommeil calme. Les cycles sont autour de 50 mn (contre 90 mn environ chez l’adulte), avec une possibilité d’éveil entre chaque cycle, de sorte que les réveils multiples sont fréquents, que ce soit pour manger ou pour découvrir son monde environnant. Par contre, il se fatigue vite et se rendort rapidement… pour 50 mn environ !
Lors du sommeil agité, majoritaire, le bébé bouge les doigts, les bras, les jambes. L’activité de son cerveau est intense. Il « s’exprime » à travers une variété de mimiques en lien avec les 6 émotions primaires de tout être humain : la joie (sourires aux anges), mais aussi la colère, la surprise, la peur, le dégout et la tristesse. Sa respiration n’est pas régulière et il peut même lui arriver d’ouvrir les yeux brièvement ou plusieurs minutes, mais il dort.
Pendant le sommeil calme, le bébé reste immobile, son visage est détendu, la respiration posée et régulière et les yeux demeurent fermés sans mouvements oculaires. Quelques sursauts peuvent subvenir ainsi que des mouvements de succion.
2/ Le sommeil de 1 mois à 1 an
Exemple de répartition avec les périodes de sommeil en sombre.
Vers deux mois les cycles s’allongent et l’horloge interne est suffisamment mature pour permettre progressivement l’alternance jour-nuit. Certains nourrissons sont capables de faire des nuits de 8 à 9 heures à cet âge, d’autres sont plus lents à installer leur rythme. Le plus souvent, vers 4 mois le bébé fait ses nuits. Mais attention, un bébé génétiquement « petit dormeur » dormira peu et pleurera plus facilement.
Entre 6 et 12 mois, l’organisation circadienne (autour des 24 h) du rythme veille/sommeil se consolide. La progression se poursuit avec des cycles qui s’allongent et se diversifient. Ainsi vers 6-9 mois, leur durée s’approche des 70 mn et se compose de 3 phases avec du sommeil paradoxal, lent et lent profond. Vers 6 mois le temps de sommeil totalise environ 14 h avec une variabilité de plus de 2 heures entre les bébés. La nuit représente maintenant environ 12 heures de sommeil, soit 10 à 12 cycles du sommeil (contre 5 à 6 chez l’adulte). En cours de journée, les périodes de sommeil sont plus courtes et sont entrecoupées d’éveils de plus en plus longs.
A partir de 9 mois, le nombre de siestes diminue pour se reporter sur la durée de récupération nocturne. C’est également à cette période que le train du sommeil débute par une phase de sommeil lent léger, puis lent profond suivi du sommeil paradoxal
3/ Le sommeil entre 1 an et 3 ans
C’est vers 12-18 mois que le sommeil a acquis les caractéristiques du sommeil de l’adulte. La maturation du sommeil se poursuit donc avec une diminution de la durée totale qui se situe à 12 – 13 heures vers 3 ans. La sieste du matin disparaît autour de 18 mois.
Le sommeil de nuit a une organisation bien stable. Par contre, la durée du cycle de sommeil change et commence à s’allonger autour des 2 ans pour atteindre 90 à 120 minutes à l’âge de 3-4 ans.
Entre minuit et 5 h du matin, des éveils peuvent subsister. Ils sont physiologiques et passent le plus souvent inaperçus car l’enfant se rendort seul. On observe aussi une augmentation du sommeil lent profond avec des phénomènes de parasomnies dès 3 ans (voir chapitre 6). La durée du sommeil nocturne est de 10 h en moyenne. Mais là encore, chaque enfant a des besoins qui lui sont propres.
4/ La sieste
Vers 1 an la sieste de fin d’après-midi disparaît avec un passage à 2 siestes par jour, l’une en fin de matinée et l’autre en début d’après-midi. Le bébé est de plus en plus éveillé dans la journée et il fait des nuits d’un sommeil plus continu et d’une durée d’une dizaine d’heures environ. Il a maintenant la capacité à se rendormir seul.
Comme mentionné un peu plus tôt, la sieste du matin disparaît ensuite vers 18 mois. Seule la sieste en tout début d’après-midi persiste pour la grande majorité, soit 90 % des enfants de cet âge. Elle se maintient habituellement en petite section de maternelle et parfois même en moyenne section mais disparaîtra progressivement entre 4 et 6 ans.
Il est donc primordial que de bonnes habitudes soient prises dès le plus jeune âge, puisque la structuration du rythme veille/sommeil se met en place avant 3 ans. Préserver la qualité et le plaisir du sommeil, respecter le caractère génétique propre à chaque enfant, c’est aider son tout-petit à grandir à travers cette fonction vitale qu’est le sommeil.
Environnement du sommeil
Il est important de créer un environnement calme et sécure pour l’enfant qui permette également aux parents de vivre sereinement les temps de sommeil.
La chambre et le lit
Dans nos cultures occidentales, le jeune enfant vit les premiers mois de sa vie le plus souvent dans un berceau ou un lit. Favoriser un environnement calme et sécurisé est donc essentiel pour lui donner les fondements d’un bon sommeil.
Dans une chambre à une température entre 18 et 20°, quotidiennement aérée, le berceau ou le lit du bébé sera plutôt de petite taille afin qu’il en sente les limites, cela le rassure.
Le matelas sera ferme et bien adapté au lit pour que l’enfant ne s’y retrouve pas piégé. Sans drap, ni couverture, ni couette, ni oreiller, le bébé dort de préférence dans une gigoteuse (douillette ou turbulette) ou un pyjama.
Le lit reste peu encombré c’est-à-dire pas de jouets ni peluches et même le doudou sera sorti du lit au cours des premiers mois.
L’obscurité est optimisée pour la nuit. Le calme et le silence prédominent (chuchotements). Toute stimulation est évitée pour favoriser la mise en place des rythmes circadiens.
La journée, par contre, la pièce où vit le bébé éveillé doit être bien éclairée. Il est souhaitable d’exposer le jeune enfant à la lumière du jour lors de promenades quotidiennes. Les moments d’éveil sont à mettre à profit pour câliner et communiquer avec son petit.
Le co-dodo
Pour éviter la séparation mère-bébé, le co-dodo (co-sommeil) est de plus en plus choisi. Installer le berceau dans la chambre parentale pendant les 2 à 3 premiers mois, apaise les parents et favorise le lien d’attachement. La période d’allaitement en cours de nuit s’en trouve aussi facilitée. Le bébé se sent sécurisé lors des réveils nocturnes par la présence constante de l’adulte. L’endormissement est d’autant plus aisé qu’il peut se synchroniser sur la respiration de sa mère.
Il est souvent recommandé d’installer progressivement bébé dans sa propre chambre dès qu’il commence à faire ses nuits, c’est-à-dire quand l’enfant parvient à dormir autour de 6 heures en continu. Les siestes peuvent représenter une transition en douceur pour l’habituer à ce changement.
Le co-sommeil contribuerait à rendre les enfants plus confiants car plus sécurisés dès leur petite enfance et favoriserait également leur autonomie et leur socialisation. De plus, il représente un facteur protecteur de la mort subite du nourrisson puisque ce sommeil partagé permet aussi sa surveillance au cours de la nuit.
Par contre, dormir avec un nourrisson de moins de 6 mois dans son lit est dangereux. Cela augmente le risque de mort subite. Etouffement, poids de la couette, mauvaise régulation de la température, représentent un risque accru de mort subite inexpliquée du nourrisson. Le risque de suffocation est particulièrement important si le parent a consommé de l’alcool ou des somnifères, ou s’il est en privation de sommeil. Plusieurs pédiatres recommandent même d’attendre l’âge minimum d’un an avant de laisser le petit enfant dormir dans le lit des parents.
Le babyphone
Le « babyphone » est placé dans la chambre par des parents inquiets ou anxieux qui souhaitent entendre la respiration de leur nourrisson. Ces appareils d’écoute émettent des ondes, potentiellement nocives. Il est donc recommandé d’éloigner l’appareil du lit du bébé et de choisir un système avec un mode de déclenchement automatique à la voix ou système VOX qui n’émet pas d’ondes en continu, et d’éteindre la base du babyphone si le récepteur est éteint.
La veilleuse
Avant 2 ans, la peur du noir n’existe pas encore chez le nourrisson. C’est vers 2 à 3 ans que certains enfants ressentent une crainte de l’obscurité. La découverte et la prise de conscience de tout un monde parfois inquiétant, peut provoquer quelques appréhensions et angoisses. Certaines histoires, des images aperçues à la télévision, impactent aussi parfois l’imaginaire du petit en pleine évolution physique, psychologique et émotionnelle. Une attitude compréhensive et bienveillante de la part des adultes aidera à surmonter ces peurs qui s’apaisent plus qu’elles ne se raisonnent. Toutefois, une veilleuse dans la chambre et/ou une porte laissée entrouverte permettra également de calmer ces frayeurs.
Endormissement et bonnes pratiques
Mettre son enfant au lit, même fatigué, ne suffit pas toujours à provoquer le sommeil. L’endormissement peut se révéler parfois délicat et certaines pratiques pourront l’y aider, tout en restant vigilant à sa sécurité.
1/ L’endormissement et la sécurité avant 1 an
L’endormissement
Sauf cas particuliers comme pour les prématurés ou les bébés très faibles, il est préférable d’éviter de réveiller un nourrisson pour le nourrir. Le mieux est de le laisser manger à la demande. A partir de 5 kg, soit autour de 8 semaines, les réserves énergétiques sont constituées. De fait, vers 4-6 mois, l’alimentation nocturne n’est plus indispensable et peut être progressivement arrêtée.
La sensation de sommeil est souvent liée à celle de satiété ressentie par le nourrisson après l’allaitement au sein ou au biberon. La tétée a, en elle-même, un effet relaxant sur le bébé qui assouvit alors son besoin de succion et de contacts rassurants à travers regards, gestes tendres et paroles.
A noter que le lait maternel contient du L-tryptophane, un acide aminé qui facilite l’endormissement.
Les médecins du sommeil conseillent souvent de coucher l’enfant avant qu’il ne se rendorme. En effet, le bambin se sentira davantage en sécurité s’il retrouve le même environnement au réveil que lors de l’endormissement. Il est donc préférable de le reposer dans son lit encore éveillé pour faciliter ses prochains retours dans les bras de Morphée.
Une fois au lit, si des pleurs persistent et dans la mesure où l’attention et les soins apportés permettent de dire qu’il n’y a pas de problème particulier, il est conseillé d’éviter de le reprendre dans les bras, ceci pour lui apprendre à s’endormir seul en toute confiance. Par contre, la présence de l’adulte à ses côtés, éventuellement une main posée sur lui, quelques mots apaisants, sera réconfortante et suffira bien souvent à le rassurer pour mieux retrouver le sommeil salutaire.
Après 6 mois il est également préférable de nourrir le bébé en dehors de sa chambre afin de dissocier sommeil et alimentation.
Comment coucher le bébé
Le bébé est couché sur le dos et uniquement sur le dos (sauf indication médicale précise), éventuellement un peu relevé en cas d’encombrement nasal, de régurgitations ou de reflux gastro-œsophagiens (toujours sur avis médical).
A éviter en fin de journée :
- Boissons vitaminées (et caféinées de type coca si l’enfant en consomme)
- Télévision et écrans
- Lumière forte, atmosphère bruyante, ambiance stimulante
- Jeux excitants, histoires anxiogènes
- Tensions familiales.
Conseils pour le coucher :
- Privilégier la régularité des horaires et le rituel du coucher, week-end et vacances inclus
- Trouver l’heure de coucher qui convient à l’enfant et non celui qui arrange les adultes, la quiétude des nuits de toute la famille en dépend !
- Privilégier la lumière naturelle en journée et les activités stimulantes pour bien synchroniser l’horloge biologique
- Aller au lit ne doitpas être une punition !
Repères pour reconnaître le besoin de sommeil :
- Il chouine et devient grognon
- Il se frotte le nez, les yeux, a le regard dans le vide
- La tête dodeline
- Il a des bâillements à répétition
- Très actif, il devient irrascible et coléreux
- De bonne humeur, il n’est pas prêt à dormir : organiser une activité calme dans sa chambre pour faire une étape avant le rituel du coucher.
Le rituel
Un rituel s’installe bien souvent progressivement au rythme de l’éveil du jeune enfant. C’est un donneur de temps qui rythme la journée et marque la transition vers le sommeil. Les chansons ou la musique accompagnent fréquemment l’endormissement du nourrisson puis la lecture et la séance « câlins » s’ajoutent au fil des mois. Mais attention à ne pas trop stimuler ces jeunes cerveaux au risque de provoquer des difficultés d’endormissement.
La présence du doudou, plus ou moins autour de 1 an, va quant à elle se substituer à la personne qui prend en charge le soin et le bien-être de l’enfant, la maman le plus souvent. Le doudou représente un lien sensoriel qui prolonge le contact avec cette personne et apaise la séparation pour glisser avec quiétude dans le sommeil. A ne pas perdre ou à avoir en double !
La tétine
Un bébé a besoin de sucer plusieurs heures par jour et pas seulement pour s’alimenter. La succion permet de ralentir le rythme cardiaque et donc de l’apaiser. C’est également un moyen pour découvrir le monde environnant en amenant tout ce qui l’entoure à la bouche.
Certains bébés ont un besoin marqué de succion pour s’endormir. Entre le pouce et une tétine, le choix se pose parfois. Utilisée uniquement comme aide à l’endormissement et uniquement pour cela, la tétine, avec une taille adaptée à la morphologie de l’enfant, ne provoque pas de déformation de la cavité buccale. Des études récentes ont même montré qu’elle avait un effet protecteur contre la mort subite du nourrisson (1).
Les éveils nocturnes
Au moment des éveils nocturnes, il est important de laisser au bébé le temps de retrouver seul le sommeil. Ces éveils sont normaux (en dehors de tout problème particulier ou d’inconforts dus à un rhume par exemple) et peuvent donner lieu à des gazouillis et des instants de vie nocturne animés.
Si des pleurs persistent, il est recommandé d’aller le voir pour tenter de le rassurer, sans le prendre dans les bras et sans rester bien longtemps. Revenir ainsi plusieurs fois si nécessaire jusqu’à endormissement.
Toutefois, le choix du « laisser pleurer » pour ne pas rendre l’enfant capricieux trouve encore ses défenseurs… Pourtant de nombreux pédiatres et pédopsychiatres s’entendent pour expliquer que des pleurs insistants provoquent un stress néfaste au développement du jeune enfant et peut même représenter un choc émotionnel nuisible à son équilibre mental. Les jeunes enfants vivent des peurs et des angoisses au cours de la petite enfance que les parents peuvent bien souvent atténuer avec amour, attention et bienveillance.
Source : Mutualité et vous