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Les petits fumeurs et les fumeurs intermittents

En France, l’opération « Mois sans tabac » organisée par Santé publique France, le Ministère des solidarités et de la santé, ainsi que la Caisse nationale d’Assurance maladie a lieu chaque année au mois de novembre depuis 2016.

Les petits fumeurs et les fumeurs intermittents

Son objectif est d’inciter les fumeurs à arrêter de fumer durant un mois grâce à des actions coordonnées de communication dans les médias et de soutien par les dispositifs d’aide à l’arrêt, tant locaux, régionaux que nationaux. Cependant, de nombreux fumeurs ne se posent même pas la question de l’arrêt du tabac car ils pensent que quelques cigarettes par jour, c’est sans danger. Ils ne sentent donc pas concernés par cette campagne nationale.

Après avoir défini cette population, nous aborderons la question de leur prise en charge et nous évoquerons ce qui pourrait être plus efficace pour ces « petits » fumeurs, en termes d’arrêt définitif du tabac.

Les petits fumeurs : de qui parle-t-on ?

En effet, il existe de nombreuses définitions, qui varient d’un pays à l’autre. Dans un article publié en 2010 dans la Revue des maladies respiratoires , les pneumologues Michel Underner et Gérard Peiffer nous donnent quelques éléments de réponse : à la différence d’auteurs anglo-saxons qui considèrent comme « petits fumeurs » ceux qui peuvent fumer 10 ou 20 cigarettes par jour, on définit le « petit fumeur » comme celui dont la consommation ne dépasse pas 5 cigarettes par jour. Le « fumeur intermittent », ou « fumeur occasionnel », ne fume pas tous les jours, il fume parfois quelques jours d’affilée et s’arrête quelques jours.

Il existe plusieurs portes d’entrée dans ce mode de tabagisme :

  • Avoir toujours été un petit fumeur (on retrouve une perception plus élevée de maladie cardiaque),
  • Des petits fumeurs qui deviennent ensuite des gros fumeurs (30 à 40 %),
  • Et, à l’opposé, des gros fumeurs qui deviennent ensuite des petits fumeurs (cette réduction ne modifie souvent en rien la consommation de tabac, par compensation).

Le nombre de petits fumeurs est en augmentation : ils représentent aujourd’hui 25 à 30 % des fumeurs. Ainsi, dans la base CDT-net, ils représentaient 23,7 % des fumeurs en 2014-2015 et maintenant ils représentent 28,7 % des fumeurs en 2016-2017 (Rakover et al., 2021 ). Plusieurs explications à ce phénomène : restriction du tabagisme au travail ou dans les lieux publics, dénormalisation du tabac, accès plus compliqué, et le prix (pour certains).

Rahmani et al. (Nicotine & Tobacco Research, 2021 ) ont montré que les niveaux socio-économique, professionnel, d’éducation et de ressources psychosociales sont plus élevés parmi les petits fumeurs (comparé aux autres catégories de fumeurs), et qu’il s’agit d’un « tabagisme social » : 75 % des petits fumeurs ne fument que s’ils en ressentent le plaisir (contre 17 % des fumeurs plus importants). Ils ont aussi la perception que le sevrage ne serait pas difficile, s’il fallait l’envisager. L’initiation à la cigarette est également plus tardive, après le lycée.

Les petits fumeurs : moins de risque que les autres ?

S’il n’y qu’une chose à retenir, après la lecture de cet article, c’est que les risques pour la santé existent dès une à quatre cigarettes ! Donc, la réponse est NON.

En ce qui concerne les risques de maladies cardio-vasculaires, une méta-analyse a été publiée en 2018 par Hackshaw et al. (BMJ ), portant sur 55 publications et voici les principaux résultats concernant les fumeurs d’une seule cigarette par jour :

  • Le risque de maladie coronarienne est augmenté de 74 % chez les hommes (par rapport aux non-fumeurs) et multiplié par 2,2 chez les femmes (par rapport aux non-fumeuses),
  • Le risque d’AVC est augmenté de 30 % chez les hommes (par rapport aux non-fumeurs) et de 46 % chez les femmes (par rapport aux non-fumeuses),
  • Par rapport aux fumeurs de 20 cigarettes/jour, ces risques ne sont diminués que de moitié.

Une grande étude américaine (Balte, 2020 ) portant sur de 18 700 fumeurs (moyenne d’âge 61 ans) suivis pendant 17 ans a comparé les risques de mortalité par maladie respiratoire ou cancer du poumon des petits fumeurs (1 à 10 cigarettes/jour) à ceux des non-fumeurs :

  • Le risque de mortalité par maladie respiratoire est multiplié par 2,5
  • Le risque de mortalité par cancer du poumon est multiplié par 8,6.

Ces risques sont moindres cependant à ceux des fumeurs de 20 cigarettes par jour : 49 % en termes de mortalité par maladie respiratoire et 71 % en termes de mortalité par cancer du poumon.

Les petits fumeurs : quelle prise en charge ?

Vu le niveau de consommation, le conseil d’arrêt est moins souvent proposé, et la difficulté à s’arrêter est bien réelle. D’autant plus que la perception du risque est faible en France : dans l’étude EROPP 2018 (OFDT, 2021 ), 15 % des personnes interrogées estiment que l’on peut fumer jusqu’à 10 cigarettes par jour sans danger pour la santé.

A partir de la base de données nationale CDT-net , il apparaît que les fumeurs de 10 cigarettes ou moins par jour sont plus nombreux à s’arrêter de fumer que les fumeurs de plus de 20 cigarettes par jour (52,7 % vs 40,2 %), selon Raker et al , en 2021. L’abstinence à 6 mois est plus élevée parmi les petits fumeurs que parmi les fumeurs de plus de 10 cigarettes par jour (Rahmani , 2021) : 30,6 % vs 26 %. Cependant, il leur est proposé des TSN (Thérapie de Substitution Nicotinique) sur des périodes plus courtes.

Il faut donc renforcer la motivation de ces « petits fumeurs », créer des groupes de « petits fumeurs », avoir recours aux TCC (Thérapies Cognitivo-Comportementales).

Le moi(s) sans tabac les concerne donc particulièrement, avec cette décision d’arrêt d’un mois qui multiplie les chances que cela dure plus longtemps !

Cependant, il est indispensable d’arrêter complétement de fumer pendant la grossesse, même quelques cigarettes comme parfois certains gynécologues le proposent encore ! Et cela doit concerner également le conjoint.

 

Source : Mutweb, Avril 2022

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